OCTOBRE 2011
Contrairement aux idées reçues, le principe des primaires est contraire aux valeurs républicaines.
Le parti socialiste n’a pas décidé des primaires pour rendre son programme plus transparent. D’ailleurs, en a-t-il un ?
Depuis la fin de l’ère mitterrandienne et le lâchage de Jospin en 2002, faute de leader affirmé, le parti de la rue de Solférino a failli imploser à plusieurs reprises. Le congrès de Rennes (1990) traumatisa nombre de militants de par son ambiance fratricide et celui de Reims (2008) fut le théâtre de tripatouillages nauséabonds confirmant que la diversité était si vaste que le parti n’était plus en capacité de se rassembler autour d’une synthèse (mascarade du congrès du Mans en 2005)
D’ailleurs, depuis Reims, aucun congrès n’a été tenu !!!
Ainsi, incapable de choisir de manière interne le candidat pour la présidentielle, le parti décida de confier au peuple « qualifié de gauche » le soin de trancher cette question.
On pourrait considérer que cette pratique est démocratique puisque le peuple fut invité à se prononcer.
Rien n’est moins sûr. Deux raisons essentielles permettent d’en douter.
Excepté Arnaud Montebourg et Manuel Valls qui ont clairement précisé leurs orientations, mais aux antipodes l’une de l’autre, les trois autres, j’excepte le radical dont on peut s’interroger de savoir ce qu’il faisait dans ce casting, ont eu un discours très proche et très confus.
Ainsi, sur quoi se prononcer, si ce n’est sur l’image, l’expression, l’esthétique ???
La preuve en est, qu’avant l’énigmatique nuit du Sofitel de New-York, Dominique Strauss-Kahn était au firmament des sondages, sans avoir prononcé un seul mot de la présidentielle puisque sa fonction au FMI lui interdisait !!!
Et c’est là qu’intervient la supercherie de ce système pour ne pas dire la manipulation.
Dans cette société hyper-médiatisée, ces shows ne seraient rien s’ils ne servaient pas aux sondagieurs, pour la plupart aux ordres du néolibéralisme, chargés de mettre en avant celles et ceux les plus à même de pérenniser le système.
Au cas présent, et dans cette volonté première d’évincer coûte que coûte l’actuel locataire de l’Elysée, le réflexe des électeurs de « gauche » aux primaires fut de se prononcer pour le candidat le plus à même d’assurer la victoire puisque placé en tête des sondages.
Pour le système, l’alternance à l’Elysée est acceptée, voire même souhaitée pour attester de la démocratie mais à une condition, qu’il ne s’agisse que d’une alternance.
Il suffit de regarder la télévision tous les soirs entre 18 et 19 H pour voir comment des présumés spécialistes s’acharnent à décrédibiliser les programmes de Mélenchon et hier de Montebourg.
En dehors de cette douteuse pratique, le processus des primaires est dangereux. Il stérilise les enrichissants et indispensables débats au sein d’un parti conduisant à une synthèse.
Avec les primaires, il suffit de se porter candidat à la candidature, de se préparer médiatiquement et le tour est joué.
Mais bien d’autres tares s’accumulent avec ce système.
Le débat populaire, démocratique et émancipateur s’en trouve malmené et à contrario, la monarchie républicaine renforcée.
Partant du principe anachronique que l’élection présidentielle est le rendez-vous entre un homme ou une femme et les électeurs, les primaires et la médiatisation qui les entourent renforcent le pouvoir personnel incarné par la 5ième République.
La méthode est simple, le candidat ou la candidate se limitent aux généralités de leurs intentions. Ainsi, en cas de succès, il (ou elle) ne peut être accusé de ne pas respecter le mandat.
Mais essayons d’être positif et imaginons ce qui se passerait si les primaires devenaient une règle absolue.
En premier lieu, l’aspect matériel n’est pas négligeable. En dehors du PS et de l’UMP, quel autre parti dispose d’une surface financière suffisante pour assurer ce genre d’exercice, sans compter les risques possibles de dérive ?
Ainsi, la généralisation des primaires conduirait tout droit au bipartisme.
Mais continuons à être positif et imaginons qu’un financement public intervienne.
Il y a en France au moins 6 à 7 partis ou groupe de partis en capacité de présenter un candidat à la présidentielle.
A raison de 3 castings télévisés par parti ou groupe de partis, les citoyens français auraient, au minimum, 21 séances à « se farcir »
A raison de 3 castings télévisés par parti ou groupe de partis, les citoyens français auraient, au minimum, 21 séances à « se farcir »
On voit bien l’absurdité du système, qui plus est, si les primaires devenaient la règle pour toutes élections.
Quant aux modèles mis en avant, il y a de quoi s’étonner.
Les Etats-Unis qui ont fait litière de la liberté d’opinion, car en dehors des Démocrates et des Républicains, point de salut ! Les Etats-Unis qui dénombrent pas moins de 45 millions de personnes sans couverture sociale ! Les Etats-Unis dont certains de leurs Etats pratiquent toujours la peine de mort !
Quant au modèle italien, on se demande si ceux qui utilisent cet argument sont sérieux. Dans ce pays, la gauche n’existe plus ! L’extrême droite, sous un faux nez, participe au gouvernement en soutenant un Président du Conseil plus attiré par les très jeunes femmes que par l’intérêt général de son pays !
Non, vraiment, les primaires, non merci.