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Les malheurs de Laurence



L’irresponsable insouciance des masses fut telle, au cours de ces derniers mois, que personne ne prit conscience du drame qui se nouait au 55 de l’avenue Bosquet à Paris.
Mme Parisot, de son prénom, Laurence, était victime de crises d’angoisse à répétition, au point de sérieusement inquiéter son entourage.
La patronne du MEDEF ne dormait plus, ne mangeait plus. Elle restait prostrée derrière son ordinateur, refusant de communiquer. Inquiétante situation, elle, d’habitude, si prompte à faire connaître son intérêt pour le monde du travail.
Beaucoup ironisait, convaincus que cet état dépressif était lié à sa volonté de présider à vie l’organisation patronale.
Ah ! Les mauvaises langues. Ah ! Les mal intentionnés. Ah ! Les malotrus.
La périlleuse situation dans laquelle se trouvait Mme Parisot n’avait aucun lien avec sa situation personnelle. Ce n’est pas le genre de la maison.
Nous en sommes convaincus depuis le 29 mars dernier.
En fait, Miss Parisot avait pris conscience de la boulette qu’elle avait commise en 2008, avec ladite position commune (Oh ! La coquine) dont le but était de vérifier l’état de santé de ses partenaires ..... sociaux cela va de soi. Elle s’inquiétait bigrement.
C’est avec quelques mois de retard que le Ministre du Travail la rassura en déposant au pied du Sapin de Noël, le cadeau tant espéré par cette chère Laurence. Elle l’avait bien mérité.
Au déballage du présent, elle était ravie, elle était comblée. Pas un partenaire n’avait failli, pas un partenaire n’avait faibli. Tous sont en excellente santé et bons pour le service.
Ainsi, la tradition perdurera, les uns un peu plus frondeurs continueront à satisfaire la belle, en déposant à ses pieds tous les reculs sociaux exigés, d’autres, aux abords quelque peu ronchons, mais finalement tout aussi disponibles, s’efforceront d’assurer le service après vente sur le terrain.
Ouf, qu’à Dieu ne plaise, les réformes de structures se poursuivront sans encombre !
Passée cette présentation qui s’est voulue sarcastique, reprenons une présentation plus conforme au sujet traité pour poursuivre l’analyse.
Les résultats de représentativité sont les suivants :
CGT : 26,77 % - CFDT : 26 % - CGT FO : 15,94 % - CFTC : 9,30 % - CFE/CGC : 9,43 %
L’UNSA et SUD n’ont pas recueilli les 8 % requis pour entrer dans le cercle des organisations représentatives.
Ainsi, tout ce petit monde est satisfait, chacun est rassuré, chacun garde son fauteuil, chacun garde son bureau, chacun garde son PC et  les horaires qui vont avec.
Encore quatre ans de gagnés.
De fait, au cours de la dernière décennie, le syndicalisme français dans son ensemble a muté, réduisant son souci de préserver l’intérêt des salariés pour privilégier la défense de ses propres infrastructures. L’objectif prioritaire est de sauver l’appareil.
Tout ceci est vérifiable, car tout ceci s’organise dans le cadre du fumeux dialogue social.
Au niveau européen, deux fois par an, Bruxelles organise un « sommet social européen » où se retrouvent des représentants de la Confédération Européenne des Syndicats et du Business Europe (le MEDEF européen)
Les cinq organisations françaises reconnues représentatives sont toutes membres de la CES.
Ce partenariat social se décline aussi dans les territoires où ladite société civile organisée pratique un consensus mou au détriment de l’intérêt des salariés.
Pendant ce temps, les militants de terrain se heurtent à l’intransigeance patronale et n’ont d’autre issue que de baisser la tête en permanence.
Cependant, les résultats sont ce qu’ils sont, le statu quo est validé, mais en dehors de ces chiffres bruts, le taux de participation ne peut pas être négligé.
Tout d’abord, les résultats des élections aux Comités d’Entreprises et à défaut aux Délégués du Personnel, gros morceau de cette opération de représentativité, reste un mystère pour le commun des mortels.
Pourquoi ce black-out ?
Parmi les scrutins enregistrés, celui des Très Petites Entreprises montre une cruelle réalité, puisque le taux de participation fut de 10,4 % Pour les Chambres d’Agriculture, il est péniblement monté à 16,1 % Pas de quoi fouetter un employeur.
Je ne rentrerai pas dans le débat du nombre d’adhérents. Demande t-on aux partis politiques de se justifier sur ce critère ?
Par contre, dans une démocratie, si l’élection ne fait pas tout, elle indique néanmoins plus qu’une tendance. L’abstention est un des éléments incontournables du scrutin. Les résultats sont généralement   liés à l’appréciation des électeurs/salariés au regard du comportement et du positionnement des concurrents syndicaux.
Si ce n’était pas le cas, pourquoi avoir, pendant de nombreuses années, revendiqué des élections à la Sécurité Sociale qui avaient pour avantage de consulter en une seule fois tous les salariés de France, actifs du secteur privé, fonctionnaires, et retraités.
Ainsi, le fort taux d’abstention aux élections qui ont servi au calcul de la représentativité syndicale montre un profond malaise.
Reconnaissons qu’il n’est pas seulement syndical. Il ne serait pas responsable d’aborder la question des corps intermédiaires uniquement par ce prisme.
U
n autre pilier de la démocratie, la presse, ou les médias pour utiliser un terme actuel, sont également en cause.
Au moment où explose au grand jour « l’affaire Cahuzac », après bien d’autres, le révélateur d’une presse apathique alimente les débats. Il est évident que les corps intermédiaires, les contrepoids nécessaires à la vitalité d’une démocratie, ne remplissent plus leur rôle.
La presse, les rédactions, les journalistes mutent progressivement en faire valoir du système ultralibéral.
Je ne considère pas qu’il y aurait une presse de droite et une presse socialiste, mais le constat est évident, la presse en générale, à de rares exceptions, se veut une presse de pouvoir.
Quelques preuves, s’il le fallait.
En 2005, l’immense majorité des médias préconisait la victoire du « Oui » au référendum sur le TCE. Résultat final : 54 % des votants ont dit « Non » !!!
En 2010, la droite est au pouvoir, pas un article de fond sur les incidences de la loi dite de Réforme Territoriale, rien sur les effets de fusion de plusieurs cantons, notamment en matière de pérennité des services publics.
Seulement quelques lignes en forme de compte rendu de projets de fusion d’EPCI.
Silence de la presse, silence complice.
2012, 2013, la majorité est devenue socialiste.
Rebelote, rien sur la réforme des élections cantonales devenant départementales. Rien sur le projet de regroupement des cantons dont la rumeur laisse entendre qu’en zones rurales des cantons pourraient être regroupés par trois voire par quatre.
Pas un mot, pas une ligne dans la presse locale de cette contre révolution et pourtant il s’agit bien de l’avenir économique et social de milliers d’habitants.
Des débats ont pourtant lieu en séance publique des exécutifs, au Conseil Général de l’Eure par exemple.
Mais non, rien dans la presse ou si peu. Tout au plus quelques comptes rendus sur des points très administratifs. A lire certains articles, on dirait un devoir de rédaction d’un élève de CM2.
Y aurait-il de la censure, je n’y crois pas ?
De l’auto censure, vraisemblablement.
Le dernier avatar médiatique est celui du référendum sur le Conseil d’Alsace. Pas un mot sur les effets négatifs de ce projet de réforme, notamment sur l’unité et l’indivisibilité de la République.
         Au plan local, il n’est pas demandé aux journalistes de faire de l’investigation, mais simplement d’informer de l’existence du pluralisme idéologique et des réels sujets qui secouent la cité.
S
ocialement, il faut s’attendre à un nouvel épisode de reculs sociaux avec la question des retraites.
Hélas, il faut craindre un remake des accords dits de compétitivité et des retraites complémentaires, avec une conclusion du style « Nous avons sauvé l’essentiel »
A force, ils finiront bien par sauver un contenant vidé de son contenu.
Alors la question posée est de savoir quoi faire ?
A mon sens, il est inutile de crier en permanence son désaccord sur le système actuel et ses serviteurs zélés.
C’est de l’indignation puissance 100, mais cela reste de l’indignation, à fortiori, stérile.
Ce qu’il faut, c’est entrer dans l’arène, quitter le costume cravate pour mettre le bleu de chauffe.
Il faut se regrouper, se rendre là où se prennent les décisions et agir concrètement. Le peuple ne doit pas rester béat devant les évènements qui lui sont contraires. C’est un droit, utilisons-le.
Il faut faire ce que trop de journalistes ne font plus, informer les gens intéressés, pour leur redonner confiance et le goût de s’investir.
         Pour le syndicalisme, le choix est clair.
Redevenir responsable en se montrant à la hauteur des enjeux de notre société et cesser ces jeux ridicules des manifs rassemblant quelques centaines de militants peu convaincus.
Les confédérations ouvrières doivent rapidement en leur sein trancher la question européenne et ne pas se limiter à de vagues admonestations qui font de leur ligne politique un vrai capharnaüm.
à Les partisans de l’Europe intégrée ou fédérale doivent avouer qu’ils s’affranchissent de la République au sens de l’article 2 de notre Constitution « Son principe est : gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple »
Le fédéralisme européen est incompatible avec cet article puisque depuis la monnaie unique et les traités y afférent, le peuple est dessaisi de tout choix et de tout contrôle de la monnaie, de l’économie et du social.
Ils doivent s’engager très clairement et mobiliser sur des questions majeures : l’harmonie fiscale, le SMIG européen et la mise en place de conventions collectives européennes avec comme point de repère les plus avantageuses pour les salariés.
Sans cet engagement clair ces organisations resteront ce qu’elles sont actuellement « des chausse-pieds » de la globalisation financière pour faire entrer les salariés dans un cadre social de plus en plus étriqué.
à Pour les partisans de l’Europe des peuples, et de la souveraineté des Etats,  de la République en fait, la monnaie unique doit être condamnée sans ambiguïté pour être remplacée par la monnaie commune complémentaire aux monnaies nationales.
Le rejet des traités liés à la monnaie unique et à la concurrence libre et non faussée doit être l’axe majeur du cahier de revendications afin de retrouver des marges de manœuvre économiques, sociales et monétaires nationales.
Cette revendication doit être le préambule à toute autre. Sans cela, le crédit des partisans de l’Europe des peuples sera aussi pauvre que celui des fédéralistes. Ils doivent également s’affranchir impérativement du qualificatif de partenaires qui s’assimile à la collaboration de classes.
Chacun dans leur rôle, les corps intermédiaires doivent se réapproprier leur place, leurs responsabilités.
Rester sous l’édredon bien douillet en attendant que passe l’orage, finira par un violent réveil.