L’insoutenable suspens entretenu par la candidature du « Che » à la présidentielle vient d’atteindre son apogée.
Depuis quatre mois, toutes celles et tous ceux qui s’intéressent à la vie politique étaient victimes d’insomnies dans l’attente de savoir si le Président d’Honneur du M.R.C. allait, comme en 2002, poursuivre sa mission jusqu’au bout, ou comme en 2007, poser sa valise en cours de route.
Pour beaucoup, la comédie de 2007 allait se reproduire car l’argument de campagne proclamé « Je suis candidat pour faire bouger les lignes » avait peu de crédit et de toute façon était éculé.
Le seul petit suspens résidait dans le choix que le « Che » ferait à l’issue de son renoncement. Allait-il soutenir le candidat du ventre mou de la gauche ou celui de la gauche affirmée ?
La violence des propos tenus, ces derniers temps, à l’adresse de ceux qui s’interrogent sur les raisons de la poursuite du nucléaire civil, ne pouvait que le conduire vers celui qui lui donnerait le plus de gage pour la poursuite de la production de cette énergie.
C’est qu’il est rancunier, le bougre. Il n’a toujours pas pardonné aux Verts l’aventure de la gauche plurielle, où il avait été contraint de démissionner de son poste ministériel, le Premier Ministre Lionel Jospin ayant donné sa préférence politique aux écolos.
Sur son blog, Chevènement tente de faire la différence entre sa position de Président d’Honneur du M.R.C. et celle du M.R.C. lui-même !!
Le 9 mars, le M.R.C. aurait conclu un accord de législature avec le PS.
Oh ! La belle affaire : le M.R.C., combien de divisions ?
N’étant pas dans la confidence, pour tenter de comprendre la crédibilité de cet accord, il est utile de mettre en parallèle les déclarations et les positions de fond des parties concernées.
Le 8 décembre 2011, Jean-Pierre Chevènement déclarait :
« La monnaie unique a été une erreur, mais il n’est pas trop tard pour rectifier l’erreur »
Il n’est pas sûr que sur ce dossier un rapprochement puisse exister, François Hollande a voté pour Maastricht, pour le T.C.E., a fait comme si les Français n’avaient pas rejeté ce Traité en se prêtant à un jeu douteux pour permettre au Congrès réuni à Versailles de ratifier le Traité de Lisbonne !!!
Le 15 décembre 2011, Jean-Pierre Chevènement indiquait qu’il était :
« favorable à l’organisation d’un référendum sur le nouveau traité européen »,
scénario tout à fait exclu par le PS et François Hollande !!
Le 4 janvier 2012, Jean-Pierre Chevènement précisait de nouveau :
« Il faut sortir des sentiers balisés par le Traité de Maastricht »,
position que rejettent catégoriquement François Hollande et le PS !!
Enfin, pour Jean-Pierre Chevènement, la règle d’or est une règle d’airain précisant que le Mécanisme Européen de Stabilité est :
«.. un pare-feu illusoire et une procédure détournée » « .. un pas de plus vers une Europe post-démocratique ».
Des propos qui n’ont jamais été tenus, ni par François Hollande, ni par le PS, ni par les socialistes européens.
Au contraire, la rue de Solférino n’est pas opposée au principe de la rigueur budgétaire européenne puisque les parlementaires socialistes (Assemblée Nationale – Sénat) se sont abstenus en majorité, au seul prétexte de vouloir une autre négociation !! A l’Assemblée Nationale, 20 Députés PS ont voté contre le MES, 130 se sont abstenus. Au Sénat les Socialistes majoritaires se sont abstenus permettant ainsi la légalisation du MES.
Le seul point d’accord est semble t’il celui d’une renégociation du nouveau traité européen, pour y inscrire une volonté de relancer la croissance économique.
Hélas, qui peut croire à cette farce ? A partir du moment où François Hollande s’engage à entrer dans les clous de la rigueur budgétaire européenne dès 2013, l’issue n’est plus la croissance mais la récession.
D’ailleurs, le 28 février au Sénat, Jean-Pierre Chevènement déclarait :
« Ce texte (le MES) s’il était adopté, nous ferait plonger dans une récession prolongée à l’échelle de la zone euro toute entière »
En définitive, ce contrat de législature n’est qu’un chiffon de papier, comme fut celui de 2002 avec Ségolène Royal.
Ce n’est pas en déclarant que l’avenir de la gauche passe par Montebourg et Mélenchon qu’il sauve la mise, au contraire, il confirme son jésuitisme puisque Montebourg a voté pour le MES et les Députés du Front de Gauche s’y sont opposés.
Mais voilà, le « Che » est satisfait, son nom circule et apparemment cela suffit à son bonheur.
Le drame pour lui c’est que sa montre politique s’est arrêtée le 13 juin 1971.
Il s’agissait du congrès d’Epinay.
Le ralliement du courant C.E.R.E.S. qu’il dirigeait avait permis à la motion Mitterrand d’arriver en tête.
Jean-Pierre Chevènement a toujours considéré que c’était lui le vainqueur d’Epinay.
S’en était suivi l’épopée du programme commun et la victoire de la gauche en 1981.
Hélas, pour le « Che » cette époque est révolue et les prétentions du petit M.R.C. qui ne se signale qu’aux échéances présidentielles ne peuvent espérer faire bouger les lignes.
Quant aux valeurs républicaines auxquelles se réclame Jean-Pierre Chevènement, celles-ci prennent quelques libertés avec la République une, indivisible et solidaire.
Au cours d’une séance au Palais du Luxembourg, tenue le 20 février, portant sur un projet de loi visant à assouplir les règles relatives à la refonte de la carte intercommunale, le Sénateur de Belfort déclarait : (Extrait)
« Je me réjouis, par ailleurs, de voir qu’à ce jour huit pôles métropolitains ont été constitués. Cette formule donne une visibilité certaine à nos grandes agglomérations, même si par ailleurs, seule une métropole – celle de Nice – a été constituée. Faut-il s’en étonner ? Il fallait s’attendre à ce que les régions et les départements ne se laissent pas facilement étêter. »
Curieuse conception de l’organisation du territoire pour un parlementaire qui se dit attaché à la République ! (voir sur ce site article De la Normandie à la Fabiusie)
Décidément, la République est mise à toutes les sauces, celle du Président d’Honneur du M.R.C. est proche de celle de Laurent Fabius, alors camarade Chevènement, encore un effort et la rue de Solférino vous accordera bien un petit bureau dans ses vastes locaux !