Pour justifier la suppression des départements, les pourfendeurs de la République sociale et laïque stigmatisent les structures administratives politiques et démocratiques issues de la grande révolution de 1789.
La question n’est pas de nier l’existence de l’absurdité du millefeuille, mais d’en énumérer les couches inutiles.
Au cours des trente dernières années, les gouvernements, toutes tendances confondues, ont produit des strates, dont l’utilité et l’efficacité de certaines sont plus que douteuses.
Les « Pays », trouvaille de Charles Pasqua en 1995, généralisés sous l’ère Jospin sur l’insistante demande du parti des « Verts », sont à ranger sur l’étagère du trop-plein.
Ces structures sont non seulement inutiles mais également dangereuses, car non démocratiques.
Dans la majeure partie des cas, le territoire des « Pays » n’a aucune consistance économique et aucune cohérence sociale.
Ses compétences sont artificielles, elles ne lui sont dévolues que pour justifier son existence et faire appel aux « fonds européens ».
Elles sont au nombre de deux.
1 – Fixer les bases de l’aménagement du territoire au travers d’un SCOT (Schéma de Cohérence Territoriale)
2 – Présenter des projets de territoire, qualifiés de structurants, dans le domaine de la rénovation ou de la construction d’équipements publics (salle des fêtes, piscine, etc…)
Or, ces deux compétences pourraient fort bien être assumées par des collectivités historiques de la République. Elles le furent dans le passé, à la satisfaction de tous.
La commune, voire l’intercommunalité, sont les niveaux pertinents pour gérer ces dossiers.
Dans la réalité, les projets structurants sont initiés, en sous-main, par des élus (es) communaux et intercommunaux.
De fait, ces « Pays » ont été créés en forme de guichet unique permettant d’obtenir des fonds européens.
Cependant, il semble nécessaire de démystifier le rideau de fumée dressé malicieusement par une majorité d’élus (es) entretenant l’idée que sans les fonds européens les travaux de rénovation ou de construction de leur piscine, de leur salle des fêtes ou autres, n’auraient jamais été réalisés.
Qui peut ignorer que ces fonds dits « européens » sont en réalité des fonds versés par les Etats ?
Or, pour l’exercice 2011 (dernier publié) sur les 19,6 milliards d’euros français adressés à Bruxelles, 13,2 milliards ont été reversés à la France dont environ 40 % d’aides aux agriculteurs essentiellement pour les céréales et le gros élevage.
La solidarité en matière financière peut se comprendre, mais que l’on ne nous raconte pas de balivernes en matière de générosité européenne.
Alors, le passage par la case « Pays » pour recevoir l’onction délibérative est une absurdité et ne relève d’aucune logique responsable.
Quant aux Plans Locaux d’Urbanisme dont la responsabilité est communale ou intercommunale, rien ne s’oppose à les fédérer en Région dont la compétence « aménagement du territoire » relève des exécutifs régionaux.
Mais l’aberration de ce millefeuille ne réside pas seulement dans les compétences biaisées qui lui sont dévolues.
La gouvernance des « Pays » est une injure aux principes élémentaires de la démocratie républicaine.
- Qui élit les délégués à l’organe délibératif des « Pays » ?
- Combien de délégués constituent l’assemblée plénière ?
- Sur quel mandat agissent-ils ?
- A qui rendent-ils compte de leur mandat ?
De fait, les délégués aux « Pays » sont des conseillers municipaux.
Lorsqu’ils se présentent aux suffrages des électeurs, proposent-ils des actions propres aux « Pays » ?
Une fois élus conseillers municipaux, certaines et certains accèdent au conseil communautaire.
C’est cette instance qui désigne les délégués au comité de Pays.
Mais, sur quel critère de gestion ?
Ainsi, d’élections en désignations, le mandat se perd dans les sables mouvants de la technocratie politicienne.
Hélas, il n’y a pas que la non-élection au suffrage direct du comité délibérant qui pose problème dans ces structures.
Le législateur a ajouté, en amont de l’organe délibérant, un conglomérat de personnalités aux responsabilités diverses dites de la « société civile » chargées de réfléchir au développement du dénommé « Pays » !!!
Ce conglomérat est pompeusement appelé « Conseil de Développement »
La nomination de ses membres est plus proche du relationnel, de l’entre-soi, du copinage avec quelques membres du comité délibérant, que de la représentation réelle de la société.
Incontestablement, cette construction n’a d’autre but que d’écrêter la diversité politique de notre société et de faire entrer dans le moule libéral la pensée émancipatrice.
Qui dit structures délibératives dit coût de gestion. Et de ce point de vue le législateur n’a pas lésiné.
Pour prendre un exemple précis, citons le « Pays Risle-Charentonne » qui englobe 7 communautés de communes : Bernay – Beaumesnil – Beaumont-le-Roger – Brionne – Broglie – Rugles – Thiberville.
Pas moins de 11 Vice-présidents accompagnent le Président et 40 personnes composent l’assemblée plénière.
Bien évidemment, toutes et tous, perçoivent des indemnités.
Mais de combien ?
Combien coûte cette entorse à la démocratie ?
Rappelons aussi que le « Pays » a une mission de développement du territoire, alors comment interpréter le silence du Pays Risle-Charentonne concernant la fermeture du collège de Broglie ?
Alors oui, s’il faut faire des économies de gestion, commençons par supprimer cette couche inutile et dangereuse du millefeuille qu’est le « Pays »