C’est bien connu, les grands-messes n’ont jamais fait de grands croyants et encore moins de grands pratiquants.
Depuis plusieurs mois, les médias nous rebattent les oreilles avec la 21ième Commission des Pays (COP 21) réunie à Paris du 29 novembre au 11 décembre.
Un grand nombre de Pays sont censés s’engager dans une démarche écologique visant à contenir le réchauffement climatique à un maximum de 2° à l’horizon 2100.
Pourquoi avoir choisi Paris pour cette grand-messe ?
Les mauvaises langues confient que c’est pratiquement un choix par défaut, peu de capitales étant disposées à assumer ce sommet.
Au fil du temps, on a vite compris que l’exécutif français avait vu dans cette réunion d’environ 150 Chefs d’Etat et de Gouvernement, un moyen de redorer l’image de la majorité gouvernementale et de réduire la fracture entre le Président et la population française.
Pour préparer ce sommet international, deux ministres furent particulièrement concernés, Ségolène Royal, Ministre de l’Ecologie et Laurent Fabius, Ministre des Affaires Etrangères.
L’une et l’autre se sont livrés, au cours de l’année, à une pathétique course à l’échalote.
La lutte pour le leadership était engagée dans cette affaire, allions-nous avoir une « madame COP 21 » ou un « monsieur COP 21 » ?
L’une et l’autre ont sillonné le monde entier pour convaincre les Chefs d’Etat et de Gouvernement visités, de participer à la COP 21 pour soutenir des engagements forts.
Car bien évidemment, la victoire sera celle de réussir le tour de force d’obtenir un accord, précis, conséquent, contraignant et massivement approuvé.
Pour mettre toutes les chances de son côté, le Président de la République avait confié une mission particulière à Nicolas Hulot.
On ne fera pas le reproche de l’amateurisme, sur ce type de dossier, à l’animateur de Ushuaïa, mais il est pour le moins curieux que Hulot soit allé requérir le soutien de la curie romaine !
Ne soyons pas dupes, les grands-messes sont rarement productives et la COP 21 risque de ne pas déroger aux habitudes.
Déjà les Etats-Unis ont fait savoir, début novembre par la voix de leur secrétaire d’Etat John Kerry, que quel que soit le texte de l’accord, il ne le considérerait pas juridiquement contraignant. Autrement dit, les Etats-Unis continueront à exploiter le gaz de schiste, à promouvoir les élevages de plusieurs milliers de têtes de bétail, à fabriquer, épandre, exporter des engrais chimiques et produits phytosanitaires, à encourager la déforestation, à poursuivre l’exploration pétrolière en Alaska (avec la Russie) etc... etc...
Autre gros pollueur, la Chine.
Va-t-elle stopper ses usines productrices d’électricité fonctionnant au charbon ?
Son programme énergétique ne va pas dans ce sens. Elle prévoit construire 38 GW de centrales à charbon tous les ans, soit trois grandes centrales par mois, puis à partir de 2022, 10 GW de centrales à charbon par an.
L’Allemagne n’est pas non plus un modèle en matière de rejet de CO2. Elle a certes renoncé à l’énergie nucléaire, mais a augmenté en conséquence sa consommation de charbon pour produire de l’électricité, ce qui n’est pas mieux.
Par ailleurs, comment faire confiance à un pays qui a laissé l'un de ses constructeurs automobiles, premier au monde et en Europe, installer sur ses véhicules un dispositif informatique permettant de tricher sur le volume de rejet de CO2 ?
Par ailleurs, comment faire confiance à un pays qui a laissé l'un de ses constructeurs automobiles, premier au monde et en Europe, installer sur ses véhicules un dispositif informatique permettant de tricher sur le volume de rejet de CO2 ?
Quant à la France, qu’ont fait nos dirigeants depuis la phrase culte prononcée par Jacques Chirac en 2002 au sommet de la terre à Johannesburg « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs » ?
Hélas, rien ou plutôt le contraire de ce qu’il faudrait faire.
Personne n’a oublié le coup de menton de Sarkozy au salon de l’agriculture en 2011 « L’environnement, ça commence à bien faire »
Quant à la déclaration de François Hollande à l’ouverture de la COP 21 « Nous devons à nos enfants une planète préservée des catastrophes » on ne peut pas dire qu’elle justifie une politique écologique des trois dernières années.
Pour attester de cela, citons quelques exemples.
Mais avant, soyons conscients, ne nous voilons pas la face.
Tant que les gouvernements, français inclus, se feront les hommes de mains de la mondialisation financière et pour nous européens, les dociles zélateurs des fumeux critères de convergence d’une dette inférieure à 3 % du PIB, aucun investissement sérieux responsable, en adéquation avec le danger qui menace les générations futures, ne sera engagé.
Hélas, nous préférons fermer les yeux sur l’évasion fiscale annuelle évaluée entre 60 et 80 milliards d’€ en France et 1.000 milliards d’€ en Europe, plutôt que de se prendre en mains pour arrêter l’incendie qui brûle notre maison, pour paraphraser Chirac !
Bien évidemment, il serait irresponsable d’ignorer l’interconnexion des économies, mais à budget quasi-constant de grandes marges de manœuvre existent en France.
L’isolation des bâtiments est l’un des secteurs le plus facile à réaliser, car hors contingence extérieure.
Les 40 milliards d’€ « balancés » au patronat sans contrepartie économique et sociale auraient été mieux utilisés dans un plan quinquennal d’isolation des bâtiments publics et d’aides aux bâtiments privés pour la construction et la réhabilitation.
Ce plan aurait assuré trois fonctions :
1 – réaliser des économies d’énergie
2 – diminuer le volume de CO2 rejeté
3 – créer des emplois dans les métiers du bâtiment
Pourquoi le donneur de leçons, de l’ouverture de la COP 21, n’a-t-il pas organisé ce vaste plan dès sa prise de fonction en mai 2012 ?
Le transport des marchandises et des personnes est, lui aussi, gros consommateur d’énergie et donc émetteur de CO2 et autres polluants.
Au fil des années, les gouvernements, tous les gouvernements, se sont désintéressés du fret ferroviaire.
Au prétexte d’un manque de souplesse sur les volumes transportés et sur les lieux d’embarquement et de débarquement, les gouvernements ont plié face aux lobbies du transport routier.
L’immense majorité des gares dites de marchandises a purement et simplement disparu.
Cette mutation a été favorisée par l’autorisation de mise en circulation de semi-remorques de 44 tonnes et par l’abandon de l’écotaxe (même si celle-ci n’était pas d’une grande ingéniosité dans sa mise en œuvre) déséquilibrant la concurrence fer/route, au profit de cette dernière.
Le bilan est clair. En 1980, 60 milliards de tonnes/kilomètres étaient transportés pour 32 milliards de tonnes/kilomètres en 2012, avec une forte décélération au cours des 15 dernières années.
La conséquence de cette politique est néfaste pour la SNCF qui se trouve privée de ressources et donc handicapée pour entretenir son matériel et ses infrastructures.
Le dépôt de Sotteville-lès-Rouen atteste de ce désintérêt des autorités politiques en matière de fret ferroviaire. Quatre cents locomotives (diésel et électrique) pourrissent sur rails dont 43 en état de rouler et 2.000 wagons, selon des cheminots de ce dépôt.
Qui n’a pas constaté l’irruption d’immenses parkings de poids lourds aux carrefours autoroutiers ?
Cette situation a de sérieuses répercussions sur le transport voyageurs.
La plupart du temps sur les lignes, hors TGV, le manque de régularité et de ponctualité est dû au manque d’entretien du matériel mais aussi au mauvais état des infrastructures obligeant les convois à ralentir.
Par ailleurs, au cours des dernières décennies, l’Etat, via la SNCF, a consacré l’essentiel de ses fonds à la construction de lignes TGV.
Ce même TGV se voit, aujourd’hui, concurrencé par le transport aérien qualifié de low cost, la plupart du temps subventionné indirectement par les Régions, sans oublier la localisation du siège des compagnies dans des paradis fiscaux.
Pire encore, l’Etat organise lui-même la concurrence à la SNCF, en autorisant le transport de voyageurs sur courte, moyenne et longue distance par des bus (1ière loi Macron)
Dans ce contexte, il serait incongru de ne pas parler du transport aérien, gros pollueur, s’il en est.
L’investissement dans la construction d’un aéroport est au minimum pour une durée de 50 ans.
C’est pourquoi le projet de Notre Dame des Landes est contraire aux objectifs auxquels doit s’assigner la COP 21 d’autant que l’ouest de la France ne manque pas d’infrastructures aéroportuaires.
L’annonce de l’abandon du projet d’aéroport de Notre Dame des Landes par le Président Hollande en clôture de la COP 21 serait un point positif pour le défi qui se présente à l’humanité.
Les réformes territoriales que nous subissons depuis plusieurs années ne vont pas dans le sens d’une sobriété énergétique et dans un moindre rejet de CO2.
Cela a commencé avec la constitution des communautés d’agglomération ?
La démarche avait un intérêt quant à l’organisation des services publics, mais l’attribution de la compétence économique est une catastrophe dans bien des cas.
Les communes, et souvent la commune la plus importante monopolise sur son territoire une ou des zones d’activités dépouillant les communes environnantes, obligeant ainsi les salariés à allonger leur parcours domicile/travail.
Il suffit de constater le phénomène le matin et le soir. Les entrées et sorties de villes sont congestionnées.
La récente création de Métropoles va amplifier le phénomène, d’autant que les aides publiques, notamment européennes, iront prioritairement vers ces concentrations d’environ 500.000 habitants.
Outre le fait que la promiscuité peut se révéler dangereuse à un moment donné, les déplacements domicile/travail s’allongeront.
A titre d’exemple, Paris intra-muros enregistre quotidiennement 250 kms de bouchons.
Autre sujet qui ne manque pas d’intérêt dans cette affaire d’énergie et de rejet de polluant, les circuits courts.
On fait souvent référence au maraichage et à l’arboriculture pour évoquer ce thème, mais bien d’autres biens de consommation sont concernés.
Hélas, les gouvernants tournent également le dos à la sobriété énergétique dans ce domaine.
Début octobre, le Président Hollande s’est rendu au Havre pour saluer le plus gros porte-conteneurs au monde : 398 mètres de long – 150.000 tonnes de port en lourd – 18.000 conteneurs pour une valeur transportée évaluée entre 1,3 milliard et 2 milliards de dollars.
Soit l’équivalent des exportations annuelles du Mali, en un seul voyage !!!
De la folie.
De la folie, car il faut évacuer ces 18.000 conteneurs.
Chaque jour, 15.000 poids lourds et 50.000 véhicules légers partent du port du Havre en utilisant des axes routiers sous-dimensionnés pour recevoir un tel trafic !
Les villes du proche hinterland du Havre ne savent plus quoi faire devant une telle avalanche de poids lourds.
Cela devient très dangereux pour la sécurité des habitants de ces bourgs et de ces villes, traversés à une allure déraisonnable.
De la folie, car ces conteneurs sont bourrés de produits manufacturés venant de Chine, que nous fabriquions sur notre sol il n’y a pas si longtemps, télévision – hi-fi – smartphone – électroménager – automobiles – jouets – matériel scolaire ......
A titre d’exemple, de ces conteneurs descendent des automobiles coréennes, entre autres, alors que Renault-Sandouville est à quelques kilomètres du Havre et que l’ex-Régie se situe en dessous des 20 % des voitures produites en France.
Voilà pourquoi les discours ampoulés prononcés à la COP 21 ont peu de chance d’aboutir.
Tant que l’affairisme, la cupidité et la spéculation financière seront le triptyque de la mondialisation, la planète et l’humanité, surtout l’humanité, seront en danger.
Le débat entre pays développés et pays émergents est une pure hypocrisie.
Bien sûr, la Chine a le droit de se hisser à la hauteur des pays développés, mais à la condition d’un mieux être des chinoises et des chinois.
L’intégration en 2001 de l’empire du milieu dans l’Organisation Mondiale du Commerce a été une autre folie.
Son régime politique et social bannissant les Droits de l’Homme a fait de ce pays l’usine du monde et donc un très gros consommateur d’énergie.
Le résultat est catastrophique, il détruit l’industrie du monde occidental, pollue pas seulement l’espace chinois et ne bénéficie qu’à 300 millions de chinoises et de chinois sur 1,3 milliard d’individus.
Quant à l’Inde, pourquoi exportons-nous nos vieux rafiots amiantés pour être déconstruits en plein air à mains nues, sans aucune protection pour les malheureux travailleurs indiens ? Il semble également que bien d’autres de nos déchets tout aussi toxiques trouvent refuge au pays de Gandhi.
Enfin, sans prétendre à l’exhaustivité, on ne peut aborder ces sujets sans évoquer la déforestation en Amazonie et en Indonésie, entre autres, qui selon les experts serait responsable de 20 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre.
Faut-il rappeler que cette déforestation est « l’œuvre » des multinationales qui font rouler des milliards de dollars en submergeant nos produits alimentaires d’huile de palme, nos élevages de soja et maïs transgénique, nos réservoirs automobiles d’agro-carburants ?
Oui, tant que les peuples n’obligeront pas les politiques à substituer à la spéculation une gestion humaniste et respectueuse de l’environnement de nos sociétés, les conférences sur le climat ne seront que foutaise.